• Je travaille en Belgique, à Ixelles, dans un contexte d’intégration maximisée, c’est-à-dire qu’on est deux enseignants à temps plein dans la classe, en permanence, parce qu’on a six enfants intégrés. Normalement ce sont des enfants qui devraient être dans l’enseignement spécialisé. 

    Je suis en équivalent CM1 et CM2 et je garderai mes élèves l’année prochaine en sixième. C’est une classe très difficile, avec des enfants qui vivent très mal les différences de niveau. Petits, ils ne sentaient pas trop qu’il y avait autant de différences, mais en grandissant, ça leur est devenu difficile de sentir cet écart.

    Aussi, nous avons décidé de travailler sur les "empêchements à apprendre" avec les outils vidéo du site proposés par la compagnie de clowns "Tape l'incruste" : Le site des empêchements. On n’a pas montré beaucoup de vidéos, parce que je voulais qu’ils mènent leur propre cheminement dans la recherche de leurs empêchements à apprendre. On les a simplement évoqués avec eux, avec la question principale : Qu’est-ce qui à votre avis peut empêcher d’apprendre ?

    Et nous avons travaillé là-dessus. J’ai montré quand même en parallèle une ou deux vidéos des clowns : « J'ai besoin de bouger » et « J’ai peur de rater ». Nous n’avons regardé que les situations de base des clowns empêchés. On s’est bien sûr interrogé sur ce qu’ils avaient compris et sur le message qui était passé.

    Là-dessus, ils ont eu envie d’en créer par rapport à leur vécu. Ils se sont mis en petits groupes et ils ont créé par équipes de nouvelles scènes d'empêchements à apprendre, sous une forme plus théâtrale que clownesque. Chaque équipe s'était constituée par empêchement, ils ont bâti une petite scène et se sont filmés. Notre idée de base était de présenter ces vidéos au reste de l’école. Comme empêchements, il y avait le stress, la peur de ne pas pouvoir répondre, le fait de penser à autre chose, l’envie qui n’est pas là. Ils ont eu beaucoup envie de parler de ce qu’il y avait dans leur tête, donc beaucoup de scènes se rapprochaient. Ils ont joué les scènes devant les autres, et tout le monde a fait des commentaires, pour pouvoir améliorer les choses, mais aussi à chercher quelles solutions on pouvait apporter.

    Ce travail a fait changer beaucoup de choses : ça a calmé beaucoup d’enfants, en montrant que ce n’était pas obligatoirement de leur faute, lorsqu’ils arrivent en classe et qu’ils n’arrivent pas à travailler, que c’était juste un empêchement. Et ils ont trouvé des solutions, qu’on a appliquées en classe. Les enfants ont adoré, ils voulaient faire ça tout le temps. Il y a des enfants qui ont été libérés de pouvoir montrer ce qui leur pose problème.

    Nous avons une élève en classe qui est en très grosse difficulté scolaire. Par exemple, il faut écrire ses calculs pour qu’elle puisse les résoudre, parce que tant que ce n’est pas bien écrit, elle ne les fera pas. Elle a joué une scène sur le stress, sous forme de jeu télévisé. J'ai senti que ça a eu un impact pour elle, notamment quand on en a discuté ensemble, parce que les autres commençaient à la comprendre. Ça l’a soulagée très fort. Elle a pu exprimer son mal-être en passant par les clowns.

    Cette année, nous continuerons, en passant aussi par des questions philosophiques.

    Carole Geerinck

    POUR ALLER PLUS LOIN

    1/ Site des empêchements à apprendre

    http://www.empechementsaapprendre.com

    2) Théâtre. Changer nos représentations

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/11304

    3) Les débats philo

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/accueil-debat-philo

    UNE QUESTION

    Le travail sur les empêchements est-il réservé aux élèves en difficulté ?


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  • Dans ma classe de CE1-CE2, il y a eu un engouement sur l'apparition de la vie sur terre. Ça a commencé par un exposé sur les méduses, tout un questionnement s'en est suivi, et comme c'était très difficile de se représenter le temps à cette échelle, je leur ai présenté une frise chronologique qui part du big-bang jusqu'à nos jours en faisant apparaître l'apparition des méduses, des petits mammifères et l'homme. Forcément, c'est impressionnant.

    "Hou là là, mais alors c'était il y a vraiment très très très très longtemps que la terre a été créée..." Forcément la question, "Mais comment est-elle arrivée ?" arrive et la réponse, "Ben c'est Dieu !" arrive aussi. Et là, un enfant répond : "Mais non, voyons, tu le vois bien que c'était il y a vraiment super longtemps, ça peut pas être Dieu, donc c'est le papi de Dieu !"

    S'en est suivi toute une discussion sur ce qu'on croit et sur ce qu'on sait avec des preuves scientifiques. Et j'explique qu'à l'école on ne va travailler que sur les faits vérifiés scientifiquement.

    Fin de la discussion ? Non, le lendemain, un enfant arrive avec un livre "Mon premier catéchisme" qui explique comment Dieu a créé la Terre. Et il me dit : "Tu vois bien maîtresse, c'est dans un livre, donc c'est vrai."

    Rebelotte, discussion sur les preuves scientifiques et ce que l'on croit. Il a fallu expliquer que pour écrire des livres, des personnes se basent sur des croyances et qu'il ne faut pas croire aveuglément tout ce qui est dans les livres.

    Là j'avoue que j'étais un peu embêtée mais bon, ça c'est terminé comme ça.

    Plus tard dans l'année, on part sur un projet pour récolter de l'argent pour l'UNICEF et on travaille sur les droits des enfants, on regarde des vidéos, on lit des brochures, et puis le même enfant me dit : "Mais en fait tout ça, moi j'en sais rien si c'est vrai tout ce qu'ils font à l'UNICEF, il faut que je croie les brochures et les vidéos, mais c'est peut-être comme un film, c'est peut-être pas vrai, c'est comme ce qu'on me raconte au catéchisme. Ou alors il faut que je te croie toi. Alors moi, j'en sais rien si c'est vrai."

    Eh, la maîtresse, tu crois que tu vas me faire avaler tout ce que tu veux ? Et bien non !

    Magali Roquefort

    POUR ALLER PLUS LOIN

    1/ N’autre école : Esprit critique, es-tu là ?

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/50502

    2/ Btj : Croyances, mythes et religion

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/49504

     UNE QUESTION

    Comment accueillir les croyances dans une école laïque ?


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  • J'ai une classe de PS/MS/GS, en milieu rural en Seine Maritime. Lors du 3ème conseil de l'année :

    H. ( 3 ans 9 mois, MS) demande la parole : " Bah  moi ze propose qu'on revoie Nina pasque ze voudrais qu'elle me dise que ze suis beau quand maman me met du zel".

    L ( 5 ans 2, GS) : " Oh je crois que tu es amoureux."

    H : " Oui c 'est ça, ze veux qu'elle me voie beau "

    Moi : " Alors oui Nina était une correspondante de la classe d' Isabelle, et tu lui avais écrit plusieurs fois. Alors comment faire pour revoir Nina ? "

    H : " Ze propose qu'on ait encore des correspondants "

    P ( 5 ans 3 mois) : " Heu y a un problème. Nina était une grande, elle est partie au CP. Elle est plus dans la classe d' Isabelle. "

    H affiche une mine très déçue.

    E ( 5 ans 9) : " T'inquiète pas H. y aura d'autres Nina dans la classe d' Isabelle. "

    Moi : " H propose d'écrire aux élèves d'Isabelle pour qu'ils deviennent nos correspondants. Qui est d'accord ? "

    Tous les doigts se lèvent très vite, enthousiastes, et H. de reprendre la parole : " Ah oui ! ", soulagé de penser que, sans doute, une autre Nina pourra apprécier son gel....   

    Une de perdue, dix de retrouvées....

    Ah quel bonheur, quand on donne la parole, de voir tous ces cheminements de pensée et ce lexique adéquat.

    Cathy Delarue

    POUR ALLER PLUS LOIN

    1) Les émotions dans la classe

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/11045

    2) La Correspondance scolaire

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/pratiques-et-recherches-9-la-correspondance-scolaire

    UNE QUESTION

    Comment intégrer naturellement les émotions dans les apprentissages ?


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