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Par G-en-vie le 9 Avril 2023 à 10:09
Le vendredi, avec mes élèves, c'est le jour de la sortie dans le village.
Ce matin, nous nous mettons donc en route. Il fait beau, nous avons de la chance.
A droite ? A gauche ? Les enfants choisissent : aujourd'hui, ce sera droite. L'itinéraire est rarement préétabli.
Nous passons sous la vieille porte, vestige du Moyen-Age qui donne son nom à notre rue. Un enfant aperçoit un nid de cigogne. Nous décidons de nous approcher. Une adorable mamie nous indique qu'on peut s'avancer dans le champ pour mieux voir le nid. Elle était en train de l’observer aussi. Nous nous rendons compte qu’en fait il y a deux cigognes. Nous passons un moment à les regarder.
Sur le chemin du retour, nous rencontrons une villageoise dans la même rue. Elle nous invite à venir voir les lapins qui sont dans son jardin. Et la voilà qui cueille et distribue à chacun des feuilles de pissenlit ! Les enfants s’approchent des cages pour les donner aux lapins qui sortent doucement de leur cachette...
« Oh, mais venez, il y a aussi des poules ! » Nous suivons notre villageoise jusqu’au poulailler où elle verse des graines dans les paumes de mains, puis laisse le pot à un enfant pour qu’il continue à le faire… Chacun jette ses graines avec plaisir.
Les regards sont pétillants, les sourires sont francs...
Le nid de cigognes est tout près. La villageoise nous dit qu’elle viendra à l’école pour nous prévenir de la naissance des cigogneaux.
A notre retour en classe, les enfants dessinent… Le chien du voisin qui était couché sur le rebord de la fenêtre, la vieille porte, une cigogne, le nid, une poule, un lapin, le chat que nous avons croisé ou le camion qui transportait une charpente, la villageoise avec son grand sourire,...
Aujourd’hui, nous sommes partis à droite… Le hasard fait bien les choses ! C’est incroyable de voir comme on peut apprendre et faire de belles rencontres en allant explorer son environnement proche !
Dorothée Ungerer-Virag
POUR ALLER PLUS LOIN
1) Sortir !
https://www.icem-pedagogie-freinet.org/accueil-sortie
2) L'"Autrement que prévu" chez Jacques Lévine
https://www.cairn.info/revue-le-coq-heron-2009-4-page-91.htm
UNE QUESTION
Comment faire de la classe un lieu de promenade permanent ?
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Par G-en-vie le 25 Janvier 2023 à 18:23
Cette année, c’est décidé, je pars en classe-promenade tous les quinze jours. Et pour rassurer mes collègues (je suis nouvelle dans l’école), je demande un parent accompagnant pour chaque sortie.
Les sorties s’enchaînent, et rapidement les questions arrivent, ainsi que les recherches pour y répondre.
Et puis viennent des interventions avec une architecte du CAUE (Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement). Lors de la première sortie pour observer les maisons et l’architecture du village, elle leur demande de dessiner certaines façades, répond à leurs nombreuses questions, réfléchit avec eux ; ils veulent faire la maquette d’une des maisons à colombage du village.
Lors du bilan, je découvre avec étonnement que l’architecte est emballée par ma classe : elle n’a jamais vu des CE aussi observateurs, curieux, aussi appliqués et doués dans le dessin d’observation ni aussi investis dans un projet.
Plus tard dans l’année, comme nous sommes sur un RPI, les élèves proposent de faire une randonnée à la journée pour aller observer le village où habitent certains enfants. Nous voilà le nez dans les cartes à mesurer nos anciens parcours pour voir quelle distance nous sommes capables de parcourir et en combien de temps. Puis vient le moment de chercher les itinéraires, encore des mesures, des conversions d’échelle. Le cheminement établi, nous voilà partis avec des parents. Étonnement de ces derniers :
- Mais, ils lisent drôlement bien la carte IGN !
- Il marche sans râler ! D’habitude le weekend, il n’y a pas moyen de le faire marcher !
- Qu’est ce qu’ils sont observateurs et curieux !
Sabine Loubet
POUR ALLER PLUS LOIN
1) Sortir !
https://www.icem-pedagogie-freinet.org/accueil-sortie
2) Le calcul vivant
https://www.icem-pedagogie-freinet.org/accueil-calcul-vivant
UNE QUESTION
Comment aborder toutes les disciplines grâce à la classe-promenade ?
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Par G-en-vie le 26 Novembre 2021 à 17:39
Université de Cergy, 13 octobre 2021
Imaginez un campus envahi par 500 congressistes, pour la plupart chercheuses/chercheurs en sciences de l’éducation. Les conférences, tables rondes et symposiums s’enchaînent, se déclinent, dessinant un panorama de « l’Ecole primaire au 21ème siècle ». De prime abord, l’ambiance se veut décontractée ; tout ce petit monde est heureux de pouvoir se retrouver après ces longues périodes d’isolement forcé. Pour autant la « forme universitaire » est de mise : exposés magistraux suivis, au mieux, de courts moment de discussion.
Il se trouve que les organisateurs de ce colloque, soucieux de donner toute leur place aux acteurs de terrain, avaient invité les mouvements pédagogiques à présenter des « expérimentations ». Dans ce contexte, l’Institut Coopératif de l’Ecole Moderne (ICEM-pédagogie Freinet) a décidé de répondre à cette invitation, en présentant le dispositif « classe-promenade » tel qu’il est mis en œuvre dans les écoles où se pratique la pédagogie coopérative, et tel qu’il est travaillé en co-formation dans les groupes de travail du mouvement.
Ce fut pour l’ICEM l’occasion de rencontrer Bruno Robbes, qui était l'animateur de cet atelier. Il nous a d’ailleurs accordé une interview dans laquelle il évoque la place de la pédagogie Freinet et des mouvements d'éducation populaire dans l’école primaire et la recherche en éducation. Dans son itinéraire de chercheur pédagogue, il a évoqué le souvenir, sinon l’héritage du regretté Jacques Pain, compagnon de route de notre mouvement, disparu le 17 janvier dernier. Il a aussi justifié la présence des mouvements pédagogiques dans un colloque universitaire en revenant sur l’histoire de l’école.
L’école, dans son évolution, dans son histoire, doit beaucoup à l’ICEM, aux CEMEA, aux Francas ou encore à l’OCCE. Il est, pour Bruno Robbes, incontournable, d’associer dès la formation (nous étions d’ailleurs dans un INSPE) les mouvements pédagogiques aux différents moments de formations initiales et continues des futurs et actuels professeurs des écoles.
https://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/63844
Notre communication acceptée, nous voilà engagés dans sa préparation, avec les contraintes d’écriture et de style particulièrement codifiées de ce type d'événement. Dans le cadre d’un atelier, l’ICEM disposera de 20 minutes pour présenter ses pratiques, suivi de 10 minutes de discussion avec les participants. Deux autres expérimentations seront présentées dans le même atelier.
(…) Diantre, que nous sommes à l’étroit dans un tel cadre ! Que nous sommes loin de nos pratiques coopératives de formation, au cours desquelles nous privilégions la mise en pratique des techniques présentées (…).
A une semaine du colloque, nous avons une idée. Et si nous proposions une « classe-promenade aux congressistes sur le site du colloque, à l’issue de l’atelier ? Nous suggérons notre idée aux organisateurs : il est trop tard pour l’inscrire au programme déjà édité, mais nous avons carte blanche pour nous organiser ! Nous éditons une affichette qui sera placardée un peu partout sur le site du colloque. Nous faisons marcher le bouche-à-oreilles. Nous bénéficions d’une annonce de dernière minute en plénière. Le rendez-vous est posé pour mercredi à 17h.
Au moment "t", une trentaine de congressistes sont au rendez-vous. La moitié a écouté notre présentation au cours de l’atelier. Nous rassemblons les participants et nous donnons les consignes : nous effectuerons ensemble une promenade de 30 minutes, à proximité du campus. Chacun peut au cours de cette promenade observer et garder des traces comme il le souhaite : notes, dessins, photos. Nous voilà partis ! Foin de symposium, et place à la pratique.
Les 30 personnes déambulent à travers l’espace de cette ville nouvelle de Cergy : sortie du campus, quartier résidentiel, square, passerelle piétonne, école, parking, espaces verts... Les uns et les autres échangent beaucoup entre eux, prolongeant les échanges informels du colloque et le doute nous traversent vaguement. Sont-ils vraiment en posture d’observation ? Mais comme avec les élèves d’une classe, nous sommes confiant.es. Et nous avons raison ! Après les 30 minutes de cheminements, nous revenons dans la salle d’atelier.
Proposition 1 : Laisser une trace de cette promenade sous la forme de son choix, cinq minutes de production libre, individuelle. Silence soudain, et magie de sentir le plaisir de la production de cette trace.
Proposition 2 : Tenter de re/tracer l’itinéraire de notre balade. Tâtonnements, rires, coopérations... pas facile !!!
Proposition 3 : Mettre en commun les observations, en les classant en 4 colonnes : j’ai vu, j’en entendu, j’ai ressenti, les questions que je me pose. Et là, ça fuse. Les observations sont multiples et diverses, les ressentis contrastés, les questions intéressantes. Pour les uns, ce tissu urbain est fluide, étonnamment vert, laissant ressentir l’arrivée de l’automne. Pour les autres, il est inodore et impersonnel, si loin de la nature. Certains y voient de la diversité, d'autres une homogénéité marquante. Une grue a évoqué la construction qui se poursuit : démolition/mutation, ou simplement « en haut/ en bas ».
Puis viennent les discussions pédagogiques : Quelle place pour le maître ? Quels apprentissages disciplinaires ? Pourquoi avoir gardé le nom « promenade » formant un oxymore avec « classe » ? Une telle situation ouverte, sans consigne précise, vise-t-elle des objectifs pédagogiques ? Comment se construit le lien aux programmes ? Peut-on proposer ce type de dispositifs à des enseignants débutants ? Quels garde-fous pour la sécurité des élèves ?
Certains découvrent, d’autres au contraire pratiquent déjà la pédagogie Freinet/institutionnelle dans leur classe ou à l’université. Tous ont pris plaisir, séduits par cette démarche : le partage d’un moment inédit et inattendu au sein d’un colloque universitaire.
Nous sommes heureux et fiers d’avoir suscité et vécu ce partage : un "moment champagne", un moment plaisir ; celui dont on se souvient ou comment faire vivre 1001 plaisirs d’apprendre… ensemble autrement
Golly, C. Hurtig Delattre, C. Jouzeau, C. Prévot
POUR ALLER PLUS LOIN
1) La Classe-Promenade
https://www.icem-pedagogie-freinet.org/recherche/adultes/results/promenade
2) Découvrir et vivre son milieu
https://www.icem-pedagogie-freinet.org/le-nouvel-educateur-222
UNE QUESTION
Est-ce qu'il y a des milieux plus propices à la découverte que d'autres ?
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Par G-en-vie le 7 Novembre 2020 à 10:32
C'est un engagement que j'avais pris : cette année, je prends le temps avec les élèves : Le matin, on bosse sur les notions que l'institution attend de nous, le français, les maths, et l'après-midi, on fait tout ce qui nous permettra de ne pas devenir dingue si l'on est re-confiné : Ateliers créatifs, peinture, jeux de société, recherches libres, dessins libres, codage... Dans un cadre très souple, relâché, pas du tout scolaire.
Au bout de 5 semaines, je ne peux que constater les bienfaits de ce choix : T., qui a du mal à faire de jolies lettres, s'est entraîné toute l'après-midi sur un texte libre qu'il avait inventé sur les martiens. A. a reproduit le logo du PSG, et s'est engagé à créer un programme de construction au compas. A. et L. se sont raconté des histoires avec le gros cube de 64 cubes aimantés, puis, L a pris son cahier de création et à spontanément écrit cette histoire dedans. A. et J. ont peint dans le couloir, essayant de donner du grain, une texture, à leur ciel , puis ont utilisé des marqueurs par dessus pour créer une scène champêtre. L. a réécrit la lettre aux correspondants. T. se régale en utilisant les petits synthés analogiques de la classe. E. a réussi à coder un parcours pour un robot de la classe. L et M s'entraînent aux tables de multiplication avec une tablette de la classe.
Quand on dit que les enfants n'ont pas d'attention au delà de 5 minutes, c'est faux. Je les vois, prendre le temps, s'acharner quand ils n'y arrivent pas ! Je vois les petits se faire entraîner par les grands, inventer des histoires, essayer d'inventer un pixel-art pour une console de jeu imaginaire.
De temps en temps, on se pose. On discute. Des choix qu'il faudra qu'ils fassent. De notre Terre que nous n'avons pas assez respectée, et que les choix que nous adultes, tardons à prendre, et qui forcément, les pousseront à être plus radicaux que nous. Et ils réclament de participer à ces décisions : "Tu te rappelles que jeudi, on a notre réunion de délégués ?".
Bouclera-t-on le programme ?
Auront-ils le niveau ?
Ce ne sont plus les questions que l'on doit se poser. Je ne prépare pas des élèves à la classe supérieure. Je prépare ce que sera le monde de demain.
Hervé Allesant (en classe unique, du CP au CM2)
POUR ALLER PLUS LOIN
1) "L'école est pressée, trop pressée" (Nouvel Educateur)
https://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/5660
2) Se libérer du programme
http://pedagost.over-blog.com/2017/06/se-liberer-du-programme.html
UNE QUESTION
Quel est le vrai fondamental à favoriser à l'école ?
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Par G-en-vie le 20 Septembre 2020 à 11:43
C'est parti, aujourd'hui a lieu notre première classe promenade !
On ne va pas se mentir, j'ai les pétoches. De quoi ? Qu'il ne se passe rien. Que mes élèves se demandent ce qu'ils peuvent bien faire là.
Nous partons de l'école un peu après 9h. J'ai fait mon speech la boule au ventre face à des enfants qui ne réagissaient pas trop : « Blabla ramenez quelque chose de votre promenade, une odeur, une image, une émotion... Blabla ».
Nous sommes partis les 24 ensemble. En rang, ça papotait de tout sauf de ce qu'il y avait autour d'eux. L. doit mener la marche où bon lui semble. Et il décide d'aller au stade, là où ils vont quand ils ont sport, là où nous irons en fin de journée. On est presque arrivé et je me demande un peu ce que je suis en train de faire. Personne ne m'a encore demandé de prendre de photos, n'a arrêté le groupe, n'a posé de question. Ils ne semblent pas comprendre, et moi non plus, ce que l'on fait là. Une première demande pour prendre une boîte aux lettres avec un rouleau dessous, mais qu'est-ce que c'est que cela ? Une élève répond du tac au tac « Bah, c'est pour mettre le journal », problème résolu, on passe à autre chose.
On est devant la maison de J., on s'arrête pour voir si on aperçoit son chien Plume, c'est bon, le voilà qui aboie. Un enfant me demande de prendre l'église en photo, sans trop savoir pourquoi. Je m'exécute, pareil pour le stade, puis le skate park. On continue notre boucle et je me demande bien si quelque chose va se passer.
Stressée, je leur rappelle la consigne et je leur dis d'arrêter de discuter puisqu'on est presque arrivé. Et là les demandes commencent à arriver. "Tu peux prendre cette fleur en photo ? Et le pommier. » « Oh on voit la lune alors qu'il fait jour ! Prends la en photo maîtresse. » « Et cet arbre, il est rigolo. » « Chouette un saule pleureur, tu le prends ? » « Bah qu'est-ce qu'ils creusent ici ? » Et moi naïve, ex-citadine, récemment arrivée en campagne « Vous savez ce que c'est ? » Eux tous « Bah oui, c'est une bétonneuse ». Ah, c'est évident pour tout le monde. « Oh maîtresse, il y a des gros champignons ici ! » « Et ici, un nid de guêpes. » Ok, on regarde de loin, la maîtresse n'a pas envie de gérer une piqûre... « Elle est belle, en fait, la forme du lampadaire devant l'école, tu peux prendre une photo ? ».
De retour en classe, on sort les cahiers d'explorateurs·trice·s, tout le monde se met vivement à dessiner, et essaie de remplir mon petit tableau (Observations/remarques ; Emotions/ressentis ; Questions que l'on se pose ; Personnes rencontrées). On se demande si on peut mettre les animaux dans les personnes rencontrées, et on décide que oui. Les questions, on s'en pose juste quelques-unes, vu qu'on a surtout papoté sur le trajet.
Mais tout de même : Pourquoi voit-on la lune le jour ? Quelle est l'espèce du champignon près de l'école ? Pourquoi y a-t-il des travaux avec un gros trou près de l'école ? Quatre élèves ont envie de chercher des réponses.
Les enfants sont tous super contents de revoir les photos et veulent aussi dessiner ce que je projette, du dessin d'observation commence. Du « bonheur » et du « calme », voilà le ressenti général lors de cette promenade. Je ne sais pas bien ce qui s'est passé, c'était sûrement très imparfait, mais quand je vois les carnets et leur sourire, je suis heureuse et j'ai bien envie de recommencer.
Marie Michaux, classe de CM2
POUR ALLER PLUS LOIN
1) Sortir
https://www.icem-pedagogie-freinet.org/accueil-sortie
2) La recherche documentaire
https://www.icem-pedagogie-freinet.org/accueil-recherche-documentaire
UNE QUESTION
Comment développer l'esprit de la classe-promenade dans tout ce qui contribue aux apprentissages : promenade dans les savoirs, dans les émotions, dans les relations... ?
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