• Plaisir VECU 22 : Du théâtre qui libère

    Première séance de travail en aide relationnelle RASED, avec A., élève de CM2, en grande difficulté scolaire, en forte « délicatesse » avec l’école aussi, délicatesse aussi familiale. A. fait souvent des crises fortes dès qu’une frustration se manifeste.

    Après un temps de parole assez rapide – A. reste méfiant, ce qui est assez logique – je lui propose de me dire ses envies pour la séance. Nous prenons appui sur la salle et son matériel (maquettes et figurines, jeux de société) et je lui fais aussi des propositions.

    Je m’attends à ce qu’il s’oriente vers un jeu de société, ce qui aurait été plus neutre affectivement comme première médiation. A ma surprise, il choisit d’inventer une histoire avec figurines, en s’aidant d’une maquette de maison qui se trouve dans la salle.

    Le temps de l’activité démarre : il choisit soigneusement les personnages et les dispose à côté de la maison. Ils sont clairement répartis en deux familles, allant du bébé au plus âgé, l’une blanche, l’autre noire. Il est prêt, je mets le minuteur sur 15 minutes et il se lance. Il est concentré, bien présent, mais le fait sans aucun son. Au bout de deux-trois minutes, je fais une pause et lui rappelle qu’il peut faire parler ses personnages. Il me répond qu’ils parlent dans sa tête. D’accord, c'est son choix. Il poursuit son récit, allant une ou deux fois chercher une nouvelle figurine.

    Les 15 minutes sont écoulées. Nous rejoignons l’espace de parole pour le troisième temps, celui du regard sur ce qui s’est passé. A. semble bien, détendu. Alors, je lui propose de me raconter son histoire :
    « C’est un père, noir, qui est marié à une femme, noire, mais il veut rencontrer une femme, blanche, car comme ça, ils auront des enfants métisses. Il incite aussi son fils à épouser une femme blanche pour la même raison : avoir des enfants métisses. Mais son épouse découvre qu’il la trompe et demande le divorce. »

    A la fin de son récit, je lui confie mon étonnement sur ce silence de 15 minutes, silence guère habituel à l’école, surtout quand il est choisi par l'élève et qu'il n'est pas celui imposé par les évaluations, par exemple. Il me répond qu’il n’a jamais vécu un temps de silence aussi long, que c’était calme, que c’était bien. Il me précise aussi qu’il s’est inspiré de ces footballeurs très connus qui ont pour compagne des femmes blanches, souvent très belles. Un signe de réussite, semble-t-il, pour lui.

    Si j’ai voulu relater cette séance, c’est pour souligner à quel point ces temps particuliers, que nous proposons à des élèves en assez grande rupture avec les exigences scolaires, ont quelque chose de rare, donc de précieux : du calme, de l’écoute, de la liberté dans un cadre précis, qui manquent à un grand nombre d’enfants, que ce soit à l’école ou dans le cercle familial. Une façon de se réconcilier un tout petit peu avec l’institution scolaire et, qui sait, à se ménager un début d’accès aux apprentissages.

    Daniel Gostain

    POUR ALLER PLUS LOIN 

    1) Le site de la Fédération Nationale des Associations des Enseignants en Aide relationnelle

    https://fnaren.fr

    2) Des pistes d'activité

    https://padlet.com/danielgostain/G

    UNE QUESTION

    Comment faire bénéficier à l'ensemble des élèves des écoles de temps de réflexion, de liberté, et d'écoute de ce qu'ils sont ? 


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