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Le vendredi, avec mes élèves, c'est le jour de la sortie dans le village.
Ce matin, nous nous mettons donc en route. Il fait beau, nous avons de la chance.
A droite ? A gauche ? Les enfants choisissent : aujourd'hui, ce sera droite. L'itinéraire est rarement préétabli.
Nous passons sous la vieille porte, vestige du Moyen-Age qui donne son nom à notre rue. Un enfant aperçoit un nid de cigogne. Nous décidons de nous approcher. Une adorable mamie nous indique qu'on peut s'avancer dans le champ pour mieux voir le nid. Elle était en train de l’observer aussi. Nous nous rendons compte qu’en fait il y a deux cigognes. Nous passons un moment à les regarder.
Sur le chemin du retour, nous rencontrons une villageoise dans la même rue. Elle nous invite à venir voir les lapins qui sont dans son jardin. Et la voilà qui cueille et distribue à chacun des feuilles de pissenlit ! Les enfants s’approchent des cages pour les donner aux lapins qui sortent doucement de leur cachette...
« Oh, mais venez, il y a aussi des poules ! » Nous suivons notre villageoise jusqu’au poulailler où elle verse des graines dans les paumes de mains, puis laisse le pot à un enfant pour qu’il continue à le faire… Chacun jette ses graines avec plaisir.
Les regards sont pétillants, les sourires sont francs...
Le nid de cigognes est tout près. La villageoise nous dit qu’elle viendra à l’école pour nous prévenir de la naissance des cigogneaux.
A notre retour en classe, les enfants dessinent… Le chien du voisin qui était couché sur le rebord de la fenêtre, la vieille porte, une cigogne, le nid, une poule, un lapin, le chat que nous avons croisé ou le camion qui transportait une charpente, la villageoise avec son grand sourire,...
Aujourd’hui, nous sommes partis à droite… Le hasard fait bien les choses ! C’est incroyable de voir comme on peut apprendre et faire de belles rencontres en allant explorer son environnement proche !
Dorothée Ungerer-Virag
POUR ALLER PLUS LOIN
1) Sortir !
https://www.icem-pedagogie-freinet.org/accueil-sortie
2) L'"Autrement que prévu" chez Jacques Lévine
https://www.cairn.info/revue-le-coq-heron-2009-4-page-91.htm
UNE QUESTION
Comment faire de la classe un lieu de promenade permanent ?
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Cette année, c’est décidé, je pars en classe-promenade tous les quinze jours. Et pour rassurer mes collègues (je suis nouvelle dans l’école), je demande un parent accompagnant pour chaque sortie.
Les sorties s’enchaînent, et rapidement les questions arrivent, ainsi que les recherches pour y répondre.
Et puis viennent des interventions avec une architecte du CAUE (Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement). Lors de la première sortie pour observer les maisons et l’architecture du village, elle leur demande de dessiner certaines façades, répond à leurs nombreuses questions, réfléchit avec eux ; ils veulent faire la maquette d’une des maisons à colombage du village.
Lors du bilan, je découvre avec étonnement que l’architecte est emballée par ma classe : elle n’a jamais vu des CE aussi observateurs, curieux, aussi appliqués et doués dans le dessin d’observation ni aussi investis dans un projet.
Plus tard dans l’année, comme nous sommes sur un RPI, les élèves proposent de faire une randonnée à la journée pour aller observer le village où habitent certains enfants. Nous voilà le nez dans les cartes à mesurer nos anciens parcours pour voir quelle distance nous sommes capables de parcourir et en combien de temps. Puis vient le moment de chercher les itinéraires, encore des mesures, des conversions d’échelle. Le cheminement établi, nous voilà partis avec des parents. Étonnement de ces derniers :
- Mais, ils lisent drôlement bien la carte IGN !
- Il marche sans râler ! D’habitude le weekend, il n’y a pas moyen de le faire marcher !
- Qu’est ce qu’ils sont observateurs et curieux !
Sabine Loubet
POUR ALLER PLUS LOIN
1) Sortir !
https://www.icem-pedagogie-freinet.org/accueil-sortie
2) Le calcul vivant
https://www.icem-pedagogie-freinet.org/accueil-calcul-vivant
UNE QUESTION
Comment aborder toutes les disciplines grâce à la classe-promenade ?
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Dès le début de l’année, je lance le Conseil dans ma nouvelle classe. En général, il a lieu le vendredi.
Les premiers conseils se passent bien mais, comme les élèves n’en ont pas l’habitude, malgré le tuilage, je suis obligée de beaucoup intervenir et donc de beaucoup parler. Cela ne me plait pas trop. En plus, je suis à la limite de l’extinction de voix (nodule et rhume obligent). Alors, ce vendredi, je décide de me mettre en retrait et je croise les doigts.
Et là, je vis un grand moment de bonheur. La présidente, aidée du président de la semaine précédente, anime superbement. Les 2 secrétaires se débrouillent tout seuls, ils ne me demandent même plus l’autorisation pour aller chercher l’agrafeuse sur mon bureau. Et le donneur de parole avec le responsable du bruit font respecter les règles d’écoute et de prise de parole.
Des propositions sont discutées, organisées et validées. Un élève propose que l’on se demande "comment ça va" tous les matins, mais en anglais. L’idée est discutée :
- Nous les CM1, nous ne savons pas le dire.
- Ben, nous vous apprendrons, répond un élève de CM2.
- Mais ça risque de prendre trop de temps. On ne pourra pas tout faire.
- Alors, on peut le faire à l’écrit au lieu de faire un tour de classe.
La discussion continue. Finalement, ce sera fait en rentrant en classe : chacun mettra son étiquette prénom sur une affiche « humeur du jour en anglais ». Les CM2 se chargent d’aider les CM1 pour le vocabulaire.
Des réponses sont apportées à des soucis qui sont récurrents et en dehors du temps de classe :
- S me tape sans raison !
- Moi aussi
- Oui, il est tout le temps comme ça avec tout le monde.
- Quand il veut vous taper ne restez pas tout seul, dit M. Quand on est plusieurs, il s’en va et il n’embête pas trop les CM2, surtout ceux qui sont grands.
- C’est vrai, moi il ne m’embête jamais, renchérit G. Vous n’avez qu’à venir près de moi quand il vous menace.
Conclusion : quand S. nous provoque ou veut nous taper, on se regroupe, de préférence avec les CM2.
Tous les jours, l’équipe doit gérer des difficultés de communication entre élèves, des insultes, des bagarres. Dans cette école où la violence entre enfants est quotidienne, ils se sont approprié ce temps de discussion et cherchent des solutions ensemble. Cela fait plaisir de les écouter parler et proposer de s’entraider.
Sabine Loubet
POUR ALLER PLUS LOIN
1) Le Conseil
https://www.icem-pedagogie-freinet.org/accueil-conseil
2) Les responsabilités
https://www.icem-pedagogie-freinet.org/accueil-metiers-responsabilites
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Comme tous les ans, j’ai installé dans ma classe un coin art plastique libre. Les élèves (il s’agit d’une classe de CE1-CE2) y vont essentiellement pendant les temps de plan de travail, en s’inscrivant pour que tout le monde puisse y aller car la table n’est pas immense et donc limitée à 6 élèves.
Dès le début de l’année, les élèves ont décidé, lors d’un Conseil, de prendre les choses en main quant au rangement et à la gestion du matériel. Ce dernier est à disposition dans une armoire. Rapidement, des enfants proposent de présenter leurs créations lors du « Quoi de neuf ?».
En parallèle, lors d’une intervention du CPIE (Centre Permanent d’Initiative pour l’Environnement), les élèves ont réalisé une maquette coopérative : chaque groupe a une planche avec le début et la fin de son morceau de rivière et doit créer un morceau de rivière et ses berges. A la fin, toutes les planches sont mises bout à bout, de la source à l’embouchure et cela forme une grande rivière.
Un jour, deux élèves viennent présenter une création. Il s’agit de hiboux jumeaux. Elles répondent aux interrogations de leurs camarades :
- Comment avez-vous fait ?
- Nous avons mis nos feuilles côte à côte, puis nous avons dessiné la branche pour qu’elle soit bien placée quand nous assemblerons les feuilles. Puis chacune a dessiné son hibou. Ensuite, nous nous sommes mises d’accord pour les couleurs.A partir de là, j’ai eu un foisonnement de ces dessins coopératifs : écureuils jumeaux, volcans jumeaux… Puis, des variantes sont arrivées. Il y a eu la période « Chacun sa demi-scène : toi tu dessines le pêcheur et moi le poisson". Et enfin les dessins à trois ou quatre. Autour de la table d’art plastique libre, ça discute, ça échange. Même ceux qui travaillent seuls donnent leur avis ou demandent l’avis des autres. Les créations s’enrichissent, les techniques s’échangent, un vrai foisonnement artistique. Que du bonheur !
Sabine Loubet
POUR ALLER PLUS LOIN
1) Créations plastiques
https://www.icem-pedagogie-freinet.org/accueil-creations-plastiques
2) Le Centre Permanent d'Initiative pour l'Environnement
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Un de mes loulous de CE1 ne vient pas du tout à l'école depuis l'année dernière pour une raison hallucinante : il joue aux jeux vidéos toute la nuit et sa maman qui l'élève seule nous dit qu'il ne veut pas l'écouter pour lui donner son écran.
Surréaliste !
Signalement, d'où accompagnement éducatif, mais toujours pas de loulou à l'école. Dix jours de présence sur sept mois d'école.
Donc, mon loulou arrive le lundi matin au car pour le départ en classe verte. Soulagement ! Il est là.
Il se régale toute la semaine, s'endort sans problème le soir et participe à tout de façon extrêmement adaptée.
Le dernier matin, contrairement aux autres matins, pas de réveil échelonné.
En ouvrant les yeux, il me regarde avec une grande sérénité et une sacrée détermination : "Maîtresse, en arrivant à la maison, je vais dire à maman de vendre ma tablette et ma Switch pour acheter des jeux de construction comme les Légos avec les sous."
Il m'a fait un gros câlin et j'ai failli verser une larme.
Fabuleux.
Je n'aurai pas donné toute cette énergie pour rien !
Pascale H.
POUR ALLER PLUS LOIN
1) Le site de Serge Tisseron
https://www.3-6-9-12.org/manifesto-notre-combat/
2) Emancipation numérique (Nouvel Educateur)
https://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/62041
UNE QUESTION
Qu'est-ce qui peut faire "déclic" dans ce que nous proposons en classe ou à l'école ?
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