•  

     

     

     

     

     

     

    Dans ce texte de T, quelque chose m'interpelle.

    Il ne s'y passe pas rien.

    D'abord, il y a ce thème de la mort, forcément.

    Ce n'est pas une mort pour rire mais une vraie mort qui surgit là : brutale, violente, angoissante. Elle déborde et elle détruit tout.

    Il y a aussi un style : le style de T. Je l'y reconnais.

    Il écrit comme il parlait l'an passé.

    Il écrit comme il se jette à l'eau pour apprendre à nager. 

    Il s'élance, puis il perd pied. Commencé comme une histoire, le texte s'enlise dans une longue phrase sans point.

    Et il y a son insistance, enfin. C'est le troisième texte de ce style que T. vient me présenter : trois fois le même thème, trois fois le même genre de meurtre, trois fois le même embrouillamini, où tout finit détruit. Il persiste.

    Il doit se jouer là quelque chose pour lui.

     

    La naissance d'une institution

    Je sens qu'il ne se passe pas rien. Mais je ne parviens pas à lui répondre.

    Il vient me montrer ce texte qui le hante. Il me demande s'il peut le lire à la classe. Et moi, je réagis en maître. Je lui réponds : non. En l'état, son texte est incorrect. Il n'est pas prêt à être lu.

    Je lui dis : « C'est intéressant mais il faut que tu le corriges avant ».

    C'est un mensonge : une formule tout faite, rappel d'un cadre, qui n'aide en rien à la situation. Il y a là plus qu'un problème d'orthographe, plus qu'un problème de syntaxe. Pour rendre son texte « propre », publiable et lisible, il faudrait l'amener à préciser ce qui le déborde, comme on force un fleuve à rentrer dans son lit. Or ce débordement, que je voudrais le voir juguler, fait partie de son texte. S'il avait pu le ranger proprement dans un coin, il ne l'aurait pas écrit. Lui demander de le rendre présentable avant de le présenter, c'est déjà le refuser.

    Je lui dis : « Il faudrait qu'on le reprenne ensemble mais là j'ai pas le temps. Viens me voir au prochain plan de travail ».

    C'est encore un mensonge, une formule toute faite. Ce n'est pas prioritairement un problème de temps. C'est un problème de position.

    Je suis le maître. Le garant d'un cadre (la classe) et d'une loi (la langue écrite). Je leur parle depuis ce lieu-là. Et ce n'est pas un maître que T. demande mais un interlocuteur. Il voudrait lire son texte. Il voudrait qu'on l'entende. D'ailleurs, au plan de travail suivant, il ne vient pas me voir. Il n'y pense pas. Se faire corriger son texte ne l'intéresse pas. Non, il revient, une semaine plus tard, avec un nouveau texte, construit sur le même modèle que le précédent, et une même demande : « Maître, ça y'est, j'ai fini un texte : est-ce que je peux le lire ? »

    Ici la relation maître-élève est une impasse. L'inter-individuel touche sa limite. Nous ne parvenons qu'à répéter sans cesse le même désaccord. Il faut que sa parole s'ouvre à d'autres qu'à ce maître, qui ne peut être, à la fois, et la bouche-loi et l'oreille-soeur. Il  faut que d'autres présences viennent traverser la boucle qui nous enferme. Il faut faire autrement :

    « Écoute, pour moi, ton texte-là n'est pas clair. Il faudrait qu'on puisse le reprendre. Mais regarde : y'a plein d'élèves qui m'attendent, là je n'ai pas le temps. Du coup, voilà ce que je te propose : vendredi matin, en français, j'écris ton texte au tableau et on le retravaille tous ensemble, avec les autres CE1. Est-ce que ça te va ? »

    T. accepte.

     

    Fébrilité

    De ce premier "toilettage de texte", je garde surtout le souvenir de ma propre fébrilité : ce n'est pas si évident de proposer une institution nouvelle.

    Ça met en cause l'existant, cette habitude, cette vraisemblance, où chacun et chacune a pu construire son petit nid de sens. Son tissage d'acceptation, d'indifférence et d'attentes contrôlées.

    Dès lors, ça peut échouer.

    Pourquoi changer ce qu'on connaît ?

    Au nom de quoi prendre le risque d'ébranler « ce qui fonctionne » ?

    « Qui se plaindra qu'il y a des nuages au ciel et de la terre pour nos pieds ? »

    Ici, le risque est d'autant plus réel qu'il acte la limite de mon pouvoir. Ma faiblesse.

    Il ne s'agit pas d'un manque technique, d'un problème de "communication". Ce n'est pas que « je n'ai pas assez bien expliqué ». Je ne peux pas répondre au texte de T. Il me faut céder ce pouvoir de répondre à un groupe d'enfants. Je dois me fier à leur capacité à écouter la parole que ce pauvre texte délivre. 

    Que se passerait-il si... ?

    L'inquiétude sourde ne va pas au bout de ses mots mais elle me rend fébrile.

    Alors je ne cède qu'à moitié : j'ouvre ce toilettage sur des questions de corrections orthographiques.

    « D'abord, on va corriger les petites erreurs, après on essaiera d'améliorer la fin ».

    L'orthographe, c'est par excellence le lieu de la loi de l'écrit. C'est un terrain où je reste le maître incontesté, où ils ne peuvent que me croire lorsque je dis : « c'est comme ça ».

    Alors je parle trop. Je me dis que je dois faire vibrer ce désir de reprise, qui ne vient pas d'eux et dans lequel je voudrais les voir s'engager. Je m'exprime haut, tout en voix et en gestes, et, dans le même temps, je les observe fébrile : Qui décroche ? Qui répond ? Comment ? Pour obéir au maître ? Ou pour creuser la voix ouverte par T. ?

    A vrai dire, je m'agite tellement que je ne vois pas grand chose, sinon le reflet de mon espoir et de mes craintes. Eux, je les vois peu.

    Malgré cette animation cahoteuse, en lutte contre elle-même, qui aurait fait demander à n'importe quel conseiller pédagogique : « Mais quel est l'objectif de votre séance ? Où est votre fiche de prep' ? »...

    Malgré cela, un autre texte finit par s'élaborer. Aujourd'hui encore, je le regarde avec fierté, tant j'ai l'impression que les suggestions des enfants ont réussi à capter-détourner le débordement morbide du texte de T., pour le conduire vers une fin inattendue, où la tragédie se retourne en comédie grinçante : « tout ça pour ça ».

     

     

     

     

     

    Jean Teissier

    POUR ALLER PLUS LOIN

    1) Le Texte libre

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/accueil-texte-libre

    2) Le Toilettage de texte

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/sites/default/files/toilettage_de_texte_02.pdf

    UNE QUESTION

    Dans quelle mesure pouvons-nous laisser voir aux élèves nos tâtonnements intérieurs ? 


    2 commentaires
  • Je reprends à temps partiel une classe du 18e arrondissement de Paris dans un établissement avec des élèves ULIS intégrés aux différentes classes selon leurs emplois du temps et où mes nouveaux collègues affichent une belle connaissance de chacun.

    Ce type de connaissance fine où quand une élève t'aborde sans te dire son nom en disant simplement "tu es la nouvelle maîtresse des CE2 ? Il parait que tu es comme ceci et comme cela. Est-ce que je peux te faire un câlin ?" (preuve que les enfants se parlent) et qu'elle ne t'a pas dit son nom, et lorsque tu racontes l'histoire en salle des maîtres, trois enseignants en même temps répondent : "Ah ça c'est forcément unetelle".

    Troisième semaine de présence, seulement donc 3 ou 4 jours avec eux. Après la récréation, la tension est palpable : il s'est passé quelque chose. On décale la séance prévue : il faut que ça sorte. Il y a une injustice : "M a tapé quelqu'un et on ne lui a rien dit, car sinon, il fait des crises... et puis il fait toujours ça et puis..."

    Moi qui ne les connais pas vraiment : "Qu'aurait-on pu faire ? On va parler chacun son tour en levant le doigt".

    Et là, moment de grâce : 

    Une élève : "On aurait pu faire un message clair". 

    Moi : "Comment faites-vous ça ?" 

    Là, trois-quatre enfants replacent tout le processus, complétant les paroles des uns des autres. 

    Puis on revient sur le sujet de discorde et sort un : "Par exemple A, qui tapait tout le temps avant, eh ben, maintenant, il ne le fait presque plus, et ça c'est bien", et arrivent tous les exemples, nombreux, de la manière dont A s'est amélioré, ce qu'on apprécie plus avec lui maintenant. A, au fond de la classe, écoute en silence et dans l'émotion la plus totale.

    "On pourrait essayer d'aider M à faire ça aussi".

    Moi : Fière de mes nouveaux élèves, même si je n'y suis absolument pour rien, fière aussi de mes collègues des années précédentes et de me dire que tout ça change le monde, petit à petit. Il y aura encore des problèmes, mais notre travail fait une différence, sans doute.

    Caroline Bouis

    POUR ALLER PLUS LOIN

    1) Les Messages clairs

    https://www.cahiers-pedagogiques.com/Des-messages-clairs-pour-cooperer

    2) S'exprimer et partager en classe

    https://padlet.com/se_lancer_en_pedagogie_freinet/1

    UNE QUESTION

    Quand on remplace un(e) collègue, faut-il suivre sa façon de faire ou non ? 


    votre commentaire
  • Cette année, c'est peut-être lié au fait que nous sommes claquemurés dans les murs de l'école, le conseil d'élèves de ma classe de CM1-CM2 est un lieu important d'interrogations et de réflexions de la part des élèves sur mes propres choix pédagogiques.

    Les élèves ont décidé en début d'année d'ajouter un temps de "Questions pour la classe" qui sont très souvent des questions pour le maître. La semaine dernière, c'est Sita qui avait demandé pourquoi dans la classe on travaillait beaucoup en groupe.

    Cette fois-ci, Fatoumata demande : "Maître, pourquoi tu as choisi d'avoir une classe de CM1 et de CM2 ?". Dans la classe, ce n'est pas vraiment un sujet : le fait d'être en CM1 ou en CM2 importe finalement assez peu. Chacun travaille sur ce qu'il/elle a besoin sauf en Géographie et en Histoire. Le reste du temps tout le monde est mélangé et c'est très bien ainsi. Même au début de l'année, cela avait suscité finalement assez peu d'interrogations. Et là, au mois de janvier, la question s'exprime. Peut-être l'habitude de s'interroger sur les choses ? Peut-être l'influence de Sita qui, arrivée début décembre, avait posé un regard neuf et plein d'interrogations sur notre classe.

    Je me tourne donc vers les élèves : "Qu'en pensez-vous ?". Même si je sais que la classe est très soudée, c'est un petit test pour moi qui tâtonne avec ce double niveau. Et si Inès ou Ibrahim qui aiment tant porter la contradiction s'improvisent pourfendeurs de la classe multi-âge ? On oublie souvent de dire que donner la parole aux élèves, c'est prendre aussi une part de risque.

    "- Avoir des CM1 et des CM2, ça permet aux CM1 d'apprendre plus de choses, remarque d'abord Sita (CM2).

    - Oui, les CM2 peuvent apprendre aux CM2 ce qu'ils savent faire. A la fin de l'année, on pourra les remercier pour ce qu'ils ont fait, complète Suzanne (CM1).

    - Les CM1 peuvent suivre l'exemple des CM2, renchérit Lynsige (CM1) qui se rêve déjà l'année prochaine, être le "grand".

    - Oui, enfin les CM1 aussi peuvent apprendre des choses aux CM2, rajoute Inès (CM1) qui ne compte pas se laisser considérer comme une "petite". On est tous capable d'apprendre aux autres. On est tous égaux.

    - Mais alors, ceux et celles qui aident les autres, ce n'est pas trop pénible ? je questionne.

    - Non, répond Fatoumata, parce qu'on apprend nous aussi en même temps."

    La responsable de l'ordre du jour nous fait signe qu'il faut avancer dans la réunion, malgré la forêt de doigts levés pour renchérir. Il y a beaucoup de sujets à traiter. Je souris sous mon masque, content que le choix du CM1-CM2 soit autant validé par les élèves, et que ces dernier.es soient de manière si évidente capables de le justifier.

    On continue : point sur le projet d'avoir un lapin, point de fonctionnement sur l'accès à l'ordinateur...

    "- Je propose qu'on ajoute une responsabilité, commence Camilla, il nous faudrait un rapporteur pour quand le maître nous laisse seuls dans la classe.

    - Pourquoi tu dis ça ?

    - Parce que quand le maître sort de la classe, il y en a qui arrêtent de travailler et se mettent à bavarder.

    Je dis : - Franchement, si on décide de ça, il faudrait lui trouver un autre nom parce que ça fait un peu "rapporteur de Paris"...

    - Ce serait plus amusant de l'appeler l'Agent, propose Inès, un peu comme un agent secret qui après raconterait ce qui s'est passé.

    - Moi, je ne suis pas d'accord, ça va créer des histoires. On a pas besoin de ça.

    Les échanges continuent un peu, puis notre responsable de l'ordre du jour propose de passer au vote. Finalement, seulement 4 pour, 6 contre et 9 abstentions. Je me permets une analyse : "Beaucoup d'élèves se sont abstenus, j'ai l'impression qu'ils étaient d'accord avec l'analyse du problème : les bavardages quand je ne suis pas là, mais qu'ils n'étaient pas convaincus par la solution trouvée. Cela vaut peut-être le coup qu'on continue à y réfléchir une prochaine fois."

    Et l'ordre du jour reprend sa course.

    Elie annonce : "Je propose que maintenant ce ne soit plus des îlots, mais des lignes."

    Ca y est : je sens le moment où ma jolie classe va se transformer en autobus. Avec un peu de chance, ça ne durera pas plus d'une semaine.

    Wilson réagit : "- Non, c’est notre classe ! Faire des lignes, c’est comme si on était en évaluation. Dans notre classe, on fait presque jamais d'évaluations.

    - Moi je trouve que c’est une mauvaise idée. Imagine, Wilson va gêner Tony pour voir le tableau.

    - Au contraire, c'est une très bonne idée, réplique Jonas. Et pour pas se gêner, on a qu'à mettre les petits devant les grands derrière. En taille bien entendu.

    - Oh non, c'est une très mauvaise idée de changer de table, parce qu'on ne pourrait plus s'aider. Avec les îlots, c'est facile de s'aider. En ligne, ça va faire un mauvais fonctionnement, analyse doctement Inès. Et puis, quand tu veux aller quelque part pour ranger une fiche, ce ne sera pas pratique du tout..."

    Je vois progressivement le spectre de la classe autobus s'éloigner doucement. Ils/elles m'étonnent, mes élèves.

    - Avant, vous tous, les autres années, vous étiez en ligne, rappelle Océane à ses camarades. Et moi je trouve que c’est mieux maintenant.

    - Et puis, on a l’habitude, mais en ligne, on n'a plus l’habitude, décrète Jade de sa voix enjouée.

    - Ce sera vraiment un problème pour travailler ensemble, conclut Sita.

    Finalement, seul Jonas a voté pour la proposition d'Elie.

    Parfois, pendant le conseil, on ne décide pas de grands choses, pas de nouveaux projets. On ne résout pas forcément de conflits non plus. Et ce jour-là, il y eut peu de félicitations et de "passage de ceinture". Mais, on discute de notre classe et de son fonctionnement : ce faisant on réaffirme des valeurs communes (l'entraide notamment) en se rendant compte à quel point elles vivent dans la classe. On explicite ce pourquoi nous sommes là : apprendre ensemble.

    Certain.es disent que la pédagogie Freinet est une pédagogie "invisible" (Bernstein), une pédagogie qui en taisant ses objectifs générerait de l'implicite et des malentendus scolaires. Je ne suis pas d'accord.

    Parce qu'elle donne la parole aux élèves, parce qu'elle suscite leurs interrogations et se construit avec eux/elles, la pédagogie Freinet, via ses institutions comme le conseil, mène la classe dans une posture réflexive sur elle-même. La classe se pense elle-même et explicite sans cesse ses finalités, son fonctionnement et les modalités d'apprentissage.

    Arthur Serret

    POUR ALLER PLUS LOIN

    1) Le Conseil

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/accueil-conseil

     2) Le Multi-Niveaux

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/12440

    UNE QUESTION

    Dans un double niveau, les élèves doivent-ils être mélangés dans la classe ou bien séparés par niveau ? 

     


    votre commentaire
  • Il y a trois semaines, nous avons concrétisé un projet évoqué depuis quelques mois avec deux collègues de CP : elles ont accueilli mes élèves de CM1-CM2 dans leurs classes dédoublées (à 13-14 élèves) pour servir de « scribes » à leurs élèves et retranscrire leurs textes libres.

    J'avoue que j'étais un peu dubitative quant aux productions car plusieurs élèves de ma classe sont peu à l'aise avec l'écrit : l'un est très dysorthographique (l'orthophoniste qui le suit m'a conseillé en début d'année de ne passer quasiment que par l'oral avec lui), un autre écrit très gros, sans suivre les lignes de son cahier et quasi-phonétiquement, une troisième écrit également avec difficultés des lettres qui s'entremêlent et ne suivent pas les lignes, et un quatrième, très envahi par des problèmes familiaux, est difficilement déchiffrable. Bref : j'avais prévenu mes collègues de ces difficultés éventuelles et nous nous sommes lancés !

    Première séance

    Chaque CM se met en binôme avec un CP. Une feuille et un crayon sont prêts à être utilisés sur chaque table : c'est parti ! Nous avons vécu une demi-heure de concentration impressionnante : les élèves chuchotaient tous, il y avait très peu de mouvements, une atmosphère sereine et calme. Après ces 30 minutes, j'ai demandé à mes élèves de finir leur phrase, de noter les noms sur les feuilles, de me les remettre et de repartir avec moi. Ils ont remercié chaleureusement leurs binômes et nous sommes remontés en classe. J'ai, dès ce moment, été impressionnée par la longueur de leurs textes, notamment ceux de mes élèves les plus en difficulté à l'écrit.

    Nous avons parlé de cette expérience en arrivant dans la classe : ils étaient attendris et émerveillés par les CP et leur imagination, m'ont demandé quand on y retournerait. Un enthousiasme général ! Et j'ai senti que mes élèves se sentaient « investis d'une mission » : ils étaient fiers d'eux. Je les ai bien sûr félicités pour leur attitude et l'intensité de leur concentration. J'ai vraiment eu la sensation d'un moment presque magique, de dépassement de soi, vécu par tous mes élèves, sans exception. Mes deux collègues m'ont ensuite fait des retours similaires : leurs élèves avaient été impressionnés par « les grands » et s'étaient également dépassés, concentrés. Ils s'étaient sentis importants et mis en valeur. On peut parler de « gagnant-gagnant », non ?

    Michèle Sillam, animatrice du groupe de soutien au soutien auquel je participe, a eu la réaction suivante lorsque je lui ai fait part de cette expérience jubilatoire : « Comment appelle-t-on le fait de faire dicter le texte d'un élève qui n'écrit pas encore à quelqu'un ? Une ”dictée à l'adulte” ! Tu as renvoyé à tes élèves le fait qu'ils étaient responsables et dignes de confiance vis-à-vis des CP et ils ont agi en conséquence ! »

    Épilogue

    Nous avons fait ensuite deux autres séances, avec des moments de corrections orthographiques et syntaxiques entre autres, et les productions sont pour la plupart longues et imaginatives. Ils les ont également illustrées ensemble. Nous allons en faire un recueil de textes que nous distribuerons aux trois classes (et aux autres !).

    Charlotte Marin

    POUR ALLER PLUS LOIN

    1) Les groupes de "soutien au soutien" 

    https://www.agsas.fr/soutien-au-soutien/

    2) Eloge du mélange des âges

    http://laclasseplaisir.eklablog.com/plaisir-vecu-212-eloge-du-melange-des-ages-a148903440

    UNE QUESTION

    Qu'est-ce qui fait qu'une activité que nous proposons provoque la mobilisation de chacun ou pas ? 


    votre commentaire
  • C’est un plaisir doux-amer…

    Je lis aux enfants un livre sur les droits de l’enfant. Il énumère simplement les différents droits de la CIDE, dans un langage adapté aux enfants, en disant « tu ».

    Première réaction, à chaud, par une petite fille pleine d'impulsivité : « Quand j’étais dans la famille d’accueil, on me poussait, on me tirait, on me traitait mal, ils n’avaient pas le droit ! ». S’ensuit une discussion sur les violences que peuvent commettre les adultes envers des enfants. Je leur parle du numéro 119, du fait que c’est important d’en parler à un adulte de confiance, si jamais ça leur arrive.

    Je dis : « Aucun adulte n’a le droit de taper les enfants. Personne n’a le droit de taper les enfants. »

    Des yeux ronds.

    « Mais ma mère, elle n’a pas le droit de me taper ?

    - Non.

    -  Mais quand on me tire par l’oreille ?

    - C’est interdit.

    - Mais quand les parents sont énervés ?

    - C’est interdit. Même si les adultes sont très en colère ils n’ont pas le droit de frapper les enfants. »

    Au-dessus du masque, je ne vois que leurs yeux, incrédules, ouverts comme des billes.

    Le lendemain, en introduction de la suite du travail sur les droits de l’enfant, je demande : « Que pourrait-on faire pour que les droits des enfants soient mieux connus et mieux respectés ? » La première réaction : « Le dire à nos parents ! »

    Ce sont des moments doux-amers, mais ce sont des moments où en tant qu’enseignante, j’ai vraiment l’impression d’avoir servi à quelque chose. Quel plaisir de voir ces enfants s’éveiller à la conscience de leurs droits !

    Lily Parent

    POUR ALLER PLUS LOIN

    1) Le Nouvel Educateur : Faire vivre les droits de l'enfant

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/60271

    2) Co-éducation à l'école

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/49701

    UNE QUESTION

    Comment éviter de faire surgir des conflits de loyauté ? 


    2 commentaires