• Dans notre école en REP, nous organisons depuis quelques années, dès les premiers jours de classe, ce que nous appelons des Olympiades, réunissant tous les enfants de l’école. Ces Olympiades se déroulent sur une matinée de la façon suivante : nous constitutons des équipes qui mélangent des enfants de toutes les classes, et donc de tous les âges, du CP au CM2. Ces équipes vont concourir sur différentes épreuves animées par les professeurs de l’école, le Directeur et les professeurs spécialisés (musique, arts visuels et EPS).

    Quelques exemples d’épreuves : le professeur d’art visuel organise un « Dessiner c’est gagné », le professeur de musique un concours de chant, le maître de l’UPEAA propose un gymkhana, le directeur de l’école propose un jeu de chasse aux mots par rapport à leur définition, d’autres proposent des activités de lancer-franc, de trottinette ou encore de courses de relais….

    Les équipes tournent sur douze ateliers toutes les 10 minutes et sur chacun d’entre eux réalisent un score. Par exemple, pour l’atelier course de relais, il faut réaliser le maximum de passages dans le temps imparti. Ainsi, l’équipe obtient un certain nombre de points en fonction de sa performance sur l’épreuve.

    A l’issue de cette matinée, tous les enfants sont rassemblés dans le préau de l’école et le palmarès est annoncé devant tous les élèves dans une ambiance très bon enfant.

    Mais le palmarès et les épreuves sont avant tout des prétextes à un véritable travail de cohésion du groupe-école. En effet, l’objectif de l’équipe était de faire en sorte que tous les élèves de l’école se rencontrent et se connaissent.

    On assiste alors dans les différentes équipes à des comportements étonnants. Entre autres : les enfants obligés de connaître le prénom des autres pour pouvoir les encourager, des grands aidant les non lecteurs à écrire les prénoms du groupe dans une forme de tutorat naturel ;  un co-apprentissage sur les ateliers nécessitant une certaine expertise ; des stratégies coopératives sur les épreuves collective de mémoire et de connaissances.

    Et surtout, dans les jours qui suivent les Olympiades, on observe un véritable changement au moment de la récréation : les enfants se mélangent dans des jeux qui ne sont plus tout à fait des jeux de grands ou de petits, mais qui deviennent des jeux partagés. De plus, dans la mesure ou les enfants apprennent à se connaître, nous avons observé aussi une diminution de la violence : on tape moins instinctivement sur l’enfant dont on connaît le prénom et avec qui on a mené un projet commun.

    C’est encore une fois la preuve qu’il faut vraiment favoriser la culture de la mixité, celle qui associe les âges différents, sans oublier les sexes et les disciplines.  

    POUR ALLER PLUS LOIN

     1/ Propositions d’activités coop sur le site de l’occe pour apprendre à se connaitre

    http://www.occe.coop/~ad82/IMG/pdf/Jeux_coop.pdf

    2/ Projets d’adultes – Nouvel Educateur

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/2661

     UNE QUESTION

    En quoi des projets transdisciplinaire et inter-cycles permettent aussi de se connaitre et se reconnaitre ?


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  • Désormais, chaque réunion matinale se termine par une séance de rire « Santé mentale » dans notre petite-moyenne section. La première fois, le fou-rire collectif a surgi, impulsé par Yasmine et Leyla, suivies de près par Noa1.

    Leyla, d'origine Kurde, ne parle pas français. Elle a eu la chance de découvrir, pour sa première entrée en collectivité, une bonne copine. Mieux, une amie. C'est simple, alors qu'elles ne se connaissaient ni d'Eve ni d'Adam, au lendemain de la rentrée, elles sont tombées dans les bras l'une de l'autre. Dès lors, elles sont toujours fourrées ensemble, assises côte à côte en réunion, choisissant les mêmes ateliers, se baladant main dans la main en récréation.

    Yasmine a une santé fragile due à des problèmes gastriques de naissance. D'origine maghrébine, ses grands-parents s'étaient expatriés en France en quête d'une vie meilleure. Tout comme, aujourd'hui, les parents de Leyla ont eu pour seule option de s’exiler pour fuir la guerre.

    Le troisième larron, Noa, de grands yeux bleu-azur éclairent son visage enfantin. Il a quitté, avec son père, les USA où ils vivaient jusqu'au décès subit de la maman par AVC, il y a un an. Après un séjour parisien, Noa vient de s'installer à Marseille en quête d'un climat mieux adapté à ses bronches.

    En ce début d'année scolaire, la troisième réunion fut donc interrompue par un fou-rire généralisé et entretenu par le trio. Leur rire tonitruant s'est communiqué comme une traînée de poudre à tout le groupe assis en cercle. Même les adultes n'ont pu résister ni au rire en cascade de Yasmine et Noa, ni à la grimace d'hilarité de Leyla. Nous avons tous ri de bon cœur jusqu'à épuisement de l'envie ou du besoin de rire. Comme nous nous sentions bien après cette thérapie collective spontanément improvisée par Yasmine (3 ans 3 mois), Leyla (2 ans 9 mois) et Noa (3 ans 2 mois). Comme cela a donné force intégrative à Leyla qui, bien que ne maîtrisant pas la langue française, a accepté, au huitième jour d'école, de prendre la parole en réunion pour dire quelque chose au groupe dans sa langue !

    Maintenant, lorsqu'elle arrive en classe, Leyla est pleine d'assurance, et c'est sur le pas de la porte qu'elle signifie à sa maman de partir immédiatement, par un au revoir de la main et un sourire rassurant. La maman, légèrement déconcertée, me lance un regard complice, notre seul mode de communication car nous ne disposons d'aucune autre langue commune.

    Depuis, nous terminons toutes nos réunions matinales par un fou-rire collectif. Après avoir distribué la parole à chaque enfant, je l'accorde au trio en lui demandant de nous faire rire. Et ça part au quart de tour. Une façon de commencer la journée bon pied bon œil. Bien à l'intérieur de soi et heureux d'être avec les autres.

    1 Les prénoms sont des pseudonymes

    POUR ALLER PLUS LOIN

    1/Accueil d’élèves allophones

    en maternelle

    http://pedagogie89.ac-dijon.fr/?Accueillir-un-eleve-nouvel-arrivant-allophone-a-la-maternelle

    2 / Des vidéos de pratiques en maternelle

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/39557

     UNE QUESTION

    Que pensez-vous de la pédagogie par l’humour ?


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  • Dès le début de l’année, dans ma classe de CP-CE2, une des responsabilités de la classe est de pointer les enfants à la cantine, aux ARE et à l’étude. C’est une lourde responsabilité car remplir ce tableau à double entrée est tout sauf une chose aisée.

    Une élève de CE2, C., est responsable de cette tâche. Au moment du temps libre, le matin, alors que chacun vaque à ses occupations, C. lance au groupe des CE2 « Qui ne reste à pas à la cantine ? Qui ne reste pas aux ARE ? Et qui reste à l’étude ? » Ceci se fait rapidement, ils sont habitués. Là où cela devient compliqué, c’est pour les CP qui souvent ne savent même pas trop ce que c’est que l’étude, ce que c’est que la cantine, ce que c’est que l’ARE, s’ils restent ou s’ils ne restent pas.

    Alors C. passe voir chaque CP et leur demande ce qu’ils vont faire dans la journée. Parfois quand il n’y a pas de réponse, elle demande à regarder dans le carnet de correspondance. C’est un choix qu’elle a fait elle-même pour avoir une réponse pertinente, car elle s’est rapidement aperçue qu’elle n’arrivait pas à attirer l’attention des CP quand elle posait la question au groupe.

    Vendredi à 15h, nous arrivons en bas de l’escalier, et le petit J., un élève de CP se retourne vers moi, complétement perdu et me pose la question : « Et qu’est ce que je fais maintenant ? ». Je me pose moi même la question. Heureusement Ch., elle aussi en CP, lui répond immédiatement : « Mais si, tu restes aux ARE, C. te l’a dit ce matin. » Et là tout est résolu. J. part avec le sourire avec Chloé. Je suis sauvée !

    Je pense que le fait qu’il y ait un lien personnel entre pairs marque davantage leur esprit. Certes J. ne sait toujours pas s’il reste ou pas, et il lui faudra sans doute encore un peu de temps, mais cette petite histoire montre une nouvelle fois que l’apprentissage est une association entre un savoir, un lien affectif, une possibilité d’être en relation avec l’autre, et pas simplement une transmission froide et impersonnelle.

    POUR ALLER PLUS LOIN

    1/ Responsabilités

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/nouvel-educateur-139-responsabilites-dans-la-classe-cooperative

    2/ Temps d’accueil

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/39437

    3/ Interrogation sur rituels ( Ifé) http://www.tousalecole.fr/content/rituels

    http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/pages/2015/01/30012015article635581990197013615.aspx

     UNE QUESTION

    En quoi responsabiliser permet aux élèves de développer leur autonomie ?


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  • C’est la rentrée ! Je suis content de ma classe, bien entendu. Qui ne serait pas content de retrouver ses chères « têtes blondes » ? Trêve de plaisanterie. Une fois le stress de la rentrée passée, on commence à sentir l’ambiance de la classe. On découvre de nouvelles têtes que les collègues nous ont présentées avec leurs mots. A nous de nous faire notre opinion. Les premiers jours sont plutôt un long fleuve tranquille, mais chacun de nous sait bien que cette semaine de rentrée n’est pas la réalité.

    Bref, cela fait déjà quatre jours que nous sommes ensemble, et le temps de notre conseil hebdomadaire arrive. Nous sommes vendredi, c’est le jour.

    A 14h00 donc, tout le monde s’installe. Les anciens - j’ai gardé dix des élèves qui étaient en CM1 avec moi l’année dernière - aident les nouveaux (les onze CM1 et un CM2 qui arrive dans l’école) à déplacer les tables, les chaises, et à s’installer correctement afin que tout les membres du conseil puissent se faire face.

    Le conseil démarre avec la lecture de l’ordre du jour. Je préside la séance car personne n’a encore de métiers dans la classe.

    Très rapidement, je suis stupéfait. Stupéfait car mes « anciens » prennent la parole, débattent, expliquent, comme ils ne l’ont jamais fait l’année dernière, alors que les CM1 sont quasiment tous (sauf la petite I., mais qui a déjà participé à des conseils de délégués dans l’école) amorphes et silencieux. Pourtant ce conseil est pour eux.

    A., qui était pourtant réfractaire à l’échange entre pairs détaille avec précisions le fonctionnement des ceintures de comportement.

    1. et J. prennent un grand plaisir à expliquer toutes les décisions prises en conseil l’année dernière, du moins celles qui les ont le plus marqués : la possibilité d’apporter une bouteille d’eau en classe, la journée de travail individuel, le fonctionnement de l’ile déserte.
    2. exulte en expliquant comment la classe a décidé que pour le bien de tous, on ne pouvait pas prendre la fiche sur laquelle quelqu’un travaillait sans lui demander l’autorisation.

    Je suis subjugué par la capacité qu'ont les grands d'expliquer clairement le fonctionnement de la classe et je souris intérieurement quand je vois le plaisir qu’ils ont à sentir ce pouvoir qu’ils ont su appréhender et utiliser à bon escient. On explique aux CM1 comment ca marche, on détaille les métiers, on précise le fonctionnement de la classe… mais rien n’y fait.  Ils discutent, sont dissipés… ne sont pas intéressés apparemment. Tout ceci me révolte, ma « séance » est gâchée, tout ça pour ça…. Les CM2 s’interrogent aussi, ce n’est pas normal, leurs camarades ne sont pas intéressés par ce conseil, cette possibilité de prendre leur destin un main ?

    Et puis, une petite voix se réveille en moi. Le temps. Il leur faut du temps. Pourquoi les CM2, habitués à la pratique du conseil s’en emparent-ils si bien ? Est-ce la pratique quotidienne du « Quoi de neuf » ? Le choix de texte hebdomadaire, avec les questions et interrogations qu'il suscite ? Notre heure de conseil tous les vendredis et les débats et décisions qui s’ensuivent ? Il est sûr que pour ma part, le langage oral revêt une importance toute particulière et que je m’efforce de lui donner toute sa part dans la classe. Mais n’est-ce que la pratique de l’oral ? Je suis intiment persuadé que plus simplement, le fait de savoir que dans cette classe, dans ce lieu de vie, toutes les opinions, toutes les paroles ont le droit d’exister et sont jugées (à 99%) par le groupe car elles touchent la vie commune que nous menons durant toute une année scolaire est un facteur déterminant dans cette capacité de prendre la parole à bonne escient pour faire avancer l’ensemble. Un mélange de psychanalyse, de pratique du français ? Certes, mais également un partage de valeurs (celles de la République ?), et de principes que nous devons défendre et promouvoir. L’échange, le débat, la décision collective ! Faire entrer la vie dans la classe, laisser à chacun le droit de s’exprimer dans le respect de tous, pour le bien du groupe, pour que tout un chacun s’empare des outils et des institutions mis sa disposition, quelle belle aventure pour ces années à venir !

    Je suis dorénavant plus qu’impatient de me retrouver le vendredi 2 septembre pour voir comment les CM1 débattront, s'expliqueront et décideront, quand ils auront vécu une année dans cet espace que je partage avec eux.

    POUR ALLER PLUS LOIN

    1/ le conseil

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/le-conseil-cle-de-voute-de-l-organisation-cooperative

    2/ ceintures de comportement

    https://www.icem-pedagogie-freinet.org/atelier-ceintures-de-comportement

     UNE QUESTION

    Comment démarrer un conseil pour qu’il fasse sens pour tous ?


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